Dans son blog personnel, André-François Ruaud, éditeur des Moutons électriques* évoque le « nature writing », un genre à « double nationalité », l’anglaise et l’américaine, dont il n’a publié que trois titres (encore que non anglo-saxons), issus de rencontres non préméditées :

J’ai déniché un petit peu d’une expression francophone du « nature writing », une approche bien à nous où un brin de fantastique permet de toucher à notre rapport avec l’environnement naturel — un fantastique à ciel ouvert. J’en veux pour preuve, par exemple, que le Marguerite répond presque exactement à la définition qu’esquissait du « nature writing » un journaliste du Figaro il y a quelques années : « Un homme. Un chien, peut-être. Un homme et son chien, éventuellement ! Des arbres, du ciel, de l’eau, de la neige, des cailloux. Des parties de pêche, de chasse, et beaucoup de solitude. »

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Ce « brin de fantastique » (d’étrangeté, donc) me semble pourtant être ce qu’il y a de plus réaliste, par le fait que ce qui émerveille dépasse ce qui se raisonne, que le rêve, yeux ouverts, nous guide et nous forge – marcher sous les arbres avec son chien, quelle puissante invitation, quelle libération ! C’est emprunter des sentiers non balisés, pour le plaisir fou d’exister. Il ne faut pas oublier qu’en français « étrange” et “forêt” partagent la même étymologie – tout comme “feuille” et “folie”…
Par le biais du souvenir d’un chien, Dick, Conte de la plaine et des bois confronte un vieil homme à l’enfance (pas seulement la sienne), car ce qui émerveille parle à l’enfant qui subsiste dans l’adulte, une part qui n’a rien d’anodin – ce que Frédérique Roussel, entre autres, a si bien traduit pour Libération :

Fantastique balade dans des bois hostiles et familiers, sensible revisitation de l’enfance perdue qui a souvent laissé en chacun de soi un Dick aimé.

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* à l’origine du nom de cette maison d’édition, pour laquelle l’imaginaire est plus une ouverture qu’un repli, se trouve le roman de Philip K. Dick, Do Androids Dream of Electric Sheep ? (Les Androïdes rêvent-ils de moutons électriques ?), à l’origine du film Blade Runner.